Aime-t-on nos enfants que s’ils nous ressemblent ?

Bonjour tout le monde,

Aujourd’hui, je voudrais vous parler de l’amour ou du désamour que nous avons pour nos enfants.

Libertaire dans l’âme, je suis pour que chacun soit ce qu’il veut être, fasse ce qui le rend heureux et s’épanouisse dans le respect de lui-même et des autres.

Je reprends cette citation de « je ne sais plus qui », il ne faut pas confondre liberté et licence.

Être soi-même ne doit pas impliquer une souffrance pour autrui, ceci étant valable pour les minorités opprimées et la majorité exprimée.

Je remercie souvent mes parents de nous avoir fait grandir dans ce hlm de Nanterre dans lequel nous avons côtoyé toutes les altérités (culte, alimentation, culture, tradition…). Un grand melting pot qui nous a appris qu’autrui, avec sa différence, est égal à soi, qu’il mérite autant, ni plus ni moins, l’amour et le respect de son prochain.

Ceci dit, je suis en conflit avec ma fille depuis plusieurs jours et celle-ci est très inquiète de perdre mon amour. Et pour cause, ce qui nous oppose me place dans un intense sentiment de frustration, de besoin de pouvoir sur elle, de colère parfois et de déception… Et oui, j’ai osé le dire.

Je pense que de multiples fois dans ma vie, j’ai été source de déception pour mes parents et je suppose que cela fait partie du processus d’émancipation, d’affirmation de soi…

Mais cela pose un certain nombre de questions fondamentales : Peut-on en vouloir à son enfant ? Peut-on arrêter d’aimer son enfant ? Notre amour n’est-il finalement que conditionnel ? Peut-on aimer son enfant s’il n’a pas les mêmes valeurs ? Comment aimer son enfant s’il est tout notre opposé ?

Ce conflit entre nous a débuté il y a quelques semaines, quand pour des raisons de santé, nous avons commencé à pratiquer l’alimentation vivante. A la maison, cela ne pose aucun problème mais à l’extérieur cela devient un véritable calvaire. Maman libertaire se transforme en maman dictateur. Au point que ce weekend pendant plusieurs heures, elle m’a littéralement engueulé en me disant, je cite :  » De toute façon avec elle (oui elle parle toujours de moi à la 3e personne quand elle est fâchée), je ne peux jamais rien faire, je ne peux rien manger, elle m’empêche d’être heureuse, j’ai perdu ma joie ».

Rappelons que la demoiselle de 4 1/2 ans joue le matin avec ses chevaux en liberté, se roule dans le sable avec son tutu, choisi ses activités sans entraves… donc un peu dur d’encaisser que je l’empêche de faire ce qu’elle veut et en même temps c’est vrai ! Je lui refuse de manger ce que le commun des mortels mange. Je voudrais les blâmer eux mais en même temps chacun fait comme il souhaite… C’est à moi de gérer ma/notre différence.

Donc cette remarque qui m’a profondément mise hors de moi (d’ailleurs je ne suis toujours pas revenu en place) me questionne dans mon éducation, ma transmission de valeur, ma capacité à aimer ma fille.

Et si finalement mon amour inconditionnel pour elle ne l’était pas autant que je le crois ? Ça me fait mal de l’admettre mais il n’est pas inconditionnel. Je serais vraiment déçue qu’elle choisisse d’autres valeurs que celles que je lui transmets, avec foi, chaque jour.

De colère, dans ce conflit du week-end, j’ai donc choisi la totale liberté et le choix conscient ! Certains me diront que je suis une inconsciente car un enfant de 4 ans n’a pas le discernement nécessaire pour faire ses propres choix (ça se discute, je pense le contraire) et qu’il est parfaitement normal de fixer des limites, de transmettre (pour ne pas dire imposer) sa religion familiale, sa culture, son folklore, son échelle de valeurs, etc.

Mais n’est-ce pas en réalité une grande hypocrisie ? N’est-ce pas simplement un refus d’offrir à nos enfants la possibilité de choisir pour eux-mêmes pour maintenir notre confort ?

On leur demande dès le plus jeune âge de se conformer à ce qu’on attend d’eux, de suivre notre volonté au détriment de la leur.

Sitôt ils s’éloignent de nos valeurs et notre monde s’écroule, on est déçu, on voudrait les renier et on se met en colère, on les menace même.

Comme une sentence magique, on dit implicitement aux plus jeunes par des phrases détournées « L’amour te sera retiré si tu es trop différent de nous ».

Et chaque enfant grandit avec cette sorte de malédiction, osant être lui-même mais en restant dans son cadre familial pour ne pas décevoir.

Vous n’êtes pas d’accord ?

Soyons honnêtes, les babas-cools socialistes vivront mal que leur enfant devienne patron flambeur du cac 40, de même que le patron du cac 40 aura probablement du mal à admettre que sa progéniture souhaite vivre en autosuffisance dans le larzac sans compte en banque.

Nous ne voulons/pouvons pas admettre les limites de nos amours car elles sont profondément et parfois inconsciemment ancrées en nous.

Prenez quelques instants pour vous demander ce qui vous placerait dans ce rejet de votre progéniture. Faites l’exercice avec honnêteté et vous verrez que notre amour est souvent conditionnel.

Si vous avez du mal, voici un exemple : si ton enfant te dit qu’il se lance dans le porno/deal de drogue, tu le prends comment ?

Perso, je vais sérieusement me poser des questions sur ma transmission… et je le vivrais très très mal !

Bref, cette décision (par colère, rappelons-le) de la laisser choisir pour elle-même est pour autant réfléchie. Je réalise que dans ma volonté de la voir en santé grâce à une alimentation de meilleure qualité, je génère une importante source de stress et des émotions négatives de tous ordres. C’est donc totalement contre-productif puisque le stress fait partie des plus grands facteurs de mauvaise santé et de mal-être.

Je crois que cette décision est aussi une libération pour nous deux. Désormais, je vais me concentrer sur mes besoins et elle sur ses besoins. Je vais apprendre à accepter qu’elle mange de la merde quand nous partageons des repas en dehors de chez nous (ce qui représente environ 50% de nos repas; oui je vous vois venir avec le « Oh ça va c’est qu’une fois de temps en temps »). Malgré nos différences avec le monde « normal », nous avons une vie sociale riche et dense.

J’en profite pour embrasser toutes les personnes qui se plient le cerveau en quatre pour nous accueillir à leur table 😘

Dans les prochains temps, cette libération devra aller de pair avec un travail émotionnel car je ne pourrais pas me permettre de la culpabiliser. En revanche, je continuerai de transmettre mes valeurs, mes croyances (que je sais évolutives) et surtout je vais continuer de l’informer que certains produits dits alimentaires sont, en réalité, des poisons et que c’est une honte (oui, oui ! Une honte) de donner ces produits à ses enfants si on les aime !

Vous pouvez le prendre comme un jugement mais pour moi filer du poison à ses enfants c’est comme leur donner une claque. Si on aime ses enfants alors on suit, encore et toujours, un projet holistique qui prend soin de l’âme, du corps et de l’esprit. Ils fonctionnent ensemble. Négliger ce fait c’est de la maltraitance qui s’ignore. Vous avez comme toujours le droit de ne pas être d’accord, ce n’est que mon avis.

Ce sera aussi un travail de reconquête de l’amour car j’ai mis beaucoup de distance entre nous et je sais qu’il va me falloir du temps pour retrouver ma fierté sans faille et ma tendresse. C’est un fonctionnement hérité de mes blessures passées, je m’enferme dans une bulle quand les choses sont trop difficiles à accepter.

Là, il s’agit de ma fille et elle est encore toute petite. Je trouve que cette situation est un bon entraînement pour plus tard car l’adolescence et son âme libre me proposeront certainement d’autres défis plus ardus. Et à ce moment là, elle ne me courra sûrement pas après pour avoir un câlin.

J’ai vu une mère et sa fille divorcer à cause de la drogue et je comprends aujourd’hui quels mécanismes étaient en branle chez l’une comme chez l’autre. Je refuse l’idée même de renier ma fille si elle emprunte une voie qui ne ME convient pas. Malgré tout, je ne nie pas la difficulté qui sera la mienne d’accepter ses choix tout en lui témoignant un amour infini et inconditionnel.

En conclusion, rappelons-nous que nous avons mis nos enfants au monde, ils s’appartiennent à eux et nous font le grand honneur de nous aimer. Ça se respecte, ça se chérit et surtout ça se partage car eux nous acceptent sans condition dès le départ, même si on est des gros nuls 🙂

Crois en toi !