Crise de foi ou comment envisager un avenir radieux
dans notre système défaillant et décadent

Bonjour tout le monde,

Je me torture, depuis plusieurs mois maintenant, à propos de l’avenir.

Je voulais partager cette réflexion avec vous car, peut-être, aurez-vous des pistes pour moi.

Je questionne donc Mon avenir en tant que personne dans cette société défaillante qui ne valorise pas les actes de ceux qui font autrement. Mon avenir en tant que femme, en tant que mère célibataire qui a choisit l’ief et donc en tant que parent « enseignant » (sans travail selon l’état).

Pour franchir ce pas, il m’a fallu quitter un emploi très bien rémunéré, vendre ma maison pour réduire au maximum les charges, composer avec les angoisses de mon entourage, dialoguer avec le père de ma fille pour qu’il accepte ce projet.

Aujourd’hui, au chômage. Je dresse un bilan en demi-teinte, j’ai dû renoncer à un projet d’école alternative faute de moyens. Mais je suis ravie de pouvoir faire l’ief et accompagner ma fille tous les jours.

Les allocations chômage sont une compensation pour les personnes qui ont travaillé. C’est ce qui me permet de subvenir à nos besoins aujourd’hui.

Mais demain ?

Je retourne des milliers d’idées dans ma tête tous les jours…

La première c’est cette non-valorisation qui me rend dingue.

Si je faisais la cuisine pour des gens qui ne sont pas ma famille -> Je serais payée pour !

Si je nettoyais la maison d’autres personnes -> Je serais payée pour !

Si je prenais soin d’autres personnes -> Je serais payée pour !

Si j’organisais l’emploi du temps d’autres personnes -> Je serais payée pour !

Si je me chargeais du déplacement d’autres personnes -> Je serais payée pour !

Si j’enseignais à d’autres personnes -> Je serais payée pour !

La liste est longue encore… voilà toutes ces choses que les parents ief font au quotidien pour leurs enfants, parfois ponctuellement avec d’autres familles.

Et tout cet investissement humain, de temps, d’énergie, de créativité, d’organisation, d’intelligence déployée est rémunérée quand elle est mise au service d’inconnus mais quand elle est mise au service de ce que l’on a de plus précieux au monde alors cela ne mérite pas qu’on soit rémunéré car, en quelques sortes, nous volons le travail des autres.

En étant une mère en ief, je vole le boulot des profs, des femmes de ménage, des cuisiniers, des chauffeurs de bus… qui sont payés pour s’occuper de nos enfants et de nos maisons. Oui, les gens qui travaillent n’ont pas le temps de faire toutes ces choses, ils payent d’autres personnes pour le faire à leur place. Enfin quand ils gagnent suffisamment d’argent pour se le permettre sinon c’est la double-peine.

Quand j’y pense, je me trouve dans une impasse. Tout cela ne vous semble pas complètement illogique ?!

Si je garde vos enfants, si je fais votre ménage, etc. Alors vous allez me payer pour ce service. Mais si je le fais chez moi, alors le temps et l’énergie que j’y ai consacré ne méritent pas d’être payés…

Je repense au dernier discours de Manu qui se sentait si concerné par les mères célibataires et je m’imagine lui hurler dessus en lui demandant pourquoi je ne peux pas être payée pour tout ça ! Parce que je te jure Manu je fais mon boulot super consciencieusement !!! Ma maison est propre, nos repas sont faits maison bio local de saison et tout et tout. On ne va jamais chez le médecin car on prend le temps de vivre dehors, de bouger, de faire attention à nous. On apprend plein de choses tous les jours et on rencontre plein de gens pour s’enrichir et créer du lien ! Aucun enfermement ici Manu ! Aucune déviance sectaire ni religieuse…

Bref ! Donc une fois mon engueulade virtuelle avec Manu passée, je me remets face à ma rumination et je l’interroge. Comment faire ? Oui, comment faire pour être payée suffisamment pour subvenir aux besoins de mon foyer tout en continuant l’ief. Comment concilier les besoins d’apprentissage grandissant de ma fille avec notre nécessité financière, notre besoin d’être dans un environnement où elle peut sortir seule dehors sans craindre pour son intégrité physique et morale.

Dans cette quête, je me suis lancée dans un nouveau projet qui nous offrirait un « boulot » à toutes les deux. Mais ce projet est encore plein de points conditionnels et si cela ne se fait pas alors que va-t-il advenir de nous ?

Bien entendu des solutions existent :

Il y a la réponse RSA et logement social qui va de pair avec le regard réprobateur de la société et de ma famille qui me traitera de « grosse conne qui profite du système pendant que nous on se crève au boulot »

Il y a trouver un mari riche, libertaire, féministe, non-violent qui veut une femme au foyer pour élever ses enfants… mais je crois que j’ai plus de chance de trouver un chaudron d’or au pied d’un arc-en-ciel (ce qui réglerait tout ou partie de la question) 😂

Il y a aussi déménager près d’une grande ville qui possède une école qui considère les enfants comme des trésors à protéger que je payerais grâce à un salaire en ayant trouvé un boulot dans mon domaine… oui, j’ai fait des études chères et là clairement je rentabilise pas du tout l’investissement…

Mais toutes ces solutions n’ont rien d’optimal ! car je suis une princesse et je veux pouvoir continuer de vivre dans un super environnement, avec un loyer modéré, continuer l’ief et ne pas nous trouver limitées dans nos déplacements et activités par manque de temps ensemble ou de moyens financiers…

Et oui ! J’ai envie de travailler et de contribuer à la société, de partager avec d’autres personnes, mais si c’est au prix de ma quiètude, de la liberté d’être et d’apprendre de ma fille, je refuse catégoriquement.

Je sais que les gens pensent que j’exagère et je présente d’avance mes excuses aux profs qui font tout leur possible pour accompagner leurs élèves en toute bonne foi. Ceci n’est pas contre vous, vous faites simplement partie d’un système défaillant.

Les écoles sont à l’enthousiasme guidant et vital des enfants ce que sont les ephad aux personnes âgées… des mouroirs !

C’est jugé durement mais c’est pourtant vrai. Je ne nie pas que l’école a été créée pour l’égalité des chances, parcequ’on ne naît pas tous, malheureusement, dans la bonne famille. Mais même un enfant né dans la mauvaise famille mérite mieux que ce modèle défaillant qui brise tout ce qui n’entre pas dans le moule.

Notre conditionnement est parfait car même les adultes qui ont réussi diront que l’école était, je cite, « un mal nécessaire » ! Putain ! Un mal nécessaire. Ceux-là confessent que c’était chiant, inintéressant et qu’ils auraient préféré être libres d’apprendre comme ils le souhaitaient mais voilà c’était comme ça et maintenant, enfin, ils font ce qu’ils aiment. Enfin, rigolons bien ensemble, ça c’est pour les plus chanceux !

Combien parmi vous détestent leur boulot et prient pour qu’enfin arrivent le weekend et les vacances ?

Combien font des burn-out, des bore-out, de l’hypertension, de l’eczéma, etc.

Combien sont tellement épuisés par leurs conditions de travail qu’ils n’ont plus la force d’être avec leurs enfants, de prendre du temps pour les écouter, les aimer…

Cette vie là Manu, j’en veux plus ! Je veux être une mère pleine de vitalité, qui prend le temps d’aimer et d’être avec son enfant avant que celle-ci ne quitte le nid pour vivre sa vie.

Je veux être la cuisinière, la femme de ménage, la secrétaire, la bricoleuse, la jardinière, la chauffeuse, la styliste, l’enseignante, la mère de cette petite fille. Et pour toutes ses autres découvertes et ses apprentissages, elle a des dizaines de personnes incroyables autour d’elle, chaque semaine, qu’elle n’aurait jamais rencontré si elle avait été enfermée entre les murs de nos prisons modernes, et moi non plus.

Et si je ne peux pas être rémunérée pour ça Manu ! Alors donne moi la possibilité de le faire pour elle et pour d’autres en même temps et place et en toute légalité ! Cela serait vraiment génial !

Crois en toi !